Graves dérapages à la prison de Forest
Que se passe-t-il exactement derrière les murs de nos prisons? Difficile de le savoir précisément tant nos prisons sont des vases clos, peu accessibles à la vérification des faits. Mais il n'y a jamais de fumée sans feu et depuis l'été 2014, des informations inquiétantes avaient filtré sur des dérapages en série à la prison de Forest.
Tout commence avec les affirmations d’un directeur, dénonçant des "expéditions punitives" menées par des surveillants de la prison de Forest. L'enquête sur ces faits, longue et difficile, se heurte rapidement à une véritable omerta régnant au sein d’un groupe d’agents pénitentiaires, menaces et pressions achevant de faire régner la loi du silence au sein du personnel.
Quatre ans et demi plus tard, 21 surveillants, de tout niveau hiérarchique, se retrouvent devant le tribunal correctionnel pour coups et blessures, traitements inhumains et dégradants, harcèlement et association de malfaiteurs.
Pour ajouter encore à l'horreur de ces faits inacceptables, on apprend que les détenus maltraités étaient ciblés : les personnes les plus fragiles, les détenus en séjour illégal et les internés étaient particulièrement visés.
Tout l'arsenal des vexations et des privations était déployé: suppression de repas, douches écourtées, fouilles répétées, mises au cachot dans des cellules sans chauffage,... "Ils étaient provoqués, humiliées, harcelés jusqu'à ce qu'ils réagissent. Ils étaient alors violemment envoyés au cachot", relate un médecin.
Une fois poussés à bout par les frustration accumulées, les détenus qui se 'rebellaient' étaient victimes de l’équipe d’intervention. Une bande de lâches qui s'en prenait aux plus faibles.
Tous ces faits, indique le procureur Catherine Debouche, ont été rendus possibles par les dysfonctionnements internes à la prison de Forest. Cette "équipe d’intervention' informelle regroupait des volontaires, qui se signalaient quotidiennement en début de service. Impossible de savoir ensuite qui en avait fait partie. Ces interventions n'étaient pas reprises dans un registre, comme c'est la règle.
Et il n'y pas que les détenus qui étaient placées sous ce régime de la terreur: une partie du personnel médical était terrifié à la simple idée de témoigner devant un juge d'instruction.
"Plus on a creusé, plus on a vu que c'était vraiment un Etat dans l'Etat", a relevé Mme Debouche, qui poursuivra son réquisitoire vendredi et lundi, précisant que tous les gardiens n'étaient évidemment pas concernés.
(LpR/Picture : régie des bâtiments)