L'Islam belge en voie de modernisation?
En même temps que le gouvernement fédéral prend des mesures essentielles pour lutter contre l'influence du salafisme, le courant de pensée dominant au sein des communautés musulmanes de Belgique, les choses évoluent au sein des communautés islamiques chez nous et ailleurs, peut-on lire dans La Dernière Heure.
En effet, des courants travaillent actuellement à la modernisation de l'Islam. Depuis les attentats, les communautés musulmanes se sont distancié des discours salafistes, observe Corinne Torrekens, islamologue à l'ULB: "Le débat a pu aborder la question de leurs dangers. On assiste à une multiplication des contre-discours et à un éclatement des référentiels."
Salah Echallaoui, président de l'EMBD, l'Exécutif des musulmans de Belgique, l'organe représentatif de l'Islam auprès de l'État, en est un bon exemple. L'homme annonce avoir concrètement engagé ce qui pourrait être une révolution historique pour l'Islam du pays.
Il rappelle qu'un bon nombre d'experts affirment que le terrorisme serait issu de deux causes : une perte de sens dans nos sociétés consuméristes qui frappent de nombreux jeunes et la présence d'un courant salafiste qui se propose comme une réponse à ce vide de repères. C'est précisément cette vision rétrograde de l'Islam qu'il entend combattre.
Dans ce contexte, Salah Echallaoui, vient d'ailleurs de décrocher une double victoire. D'une part, les négociations sont engagées avec le fédéral pour mettre en place une formation obligatoire pour les imams. D'autre part, après avoir éjecté le CICB (Centre Islamique et Culturel de Belgique) de la grande mosquée du Cinquantenaire, le gouvernement a décidé de confier sa gestion à l'EMBD. Selon Salah Echallaoui, l'expulsion du CICB ne suffira pas à résoudre tous les défis. Le discours salafiste restant très facilement disponible sur Internet et via de nombreux ouvrages. Il précise: "Ces livres, on ne peut pas les interdire, mais on peut stopper leur entrée dans les écoles et les prisons. Désormais, un livre qui est proposé dans une prison doit avoir l'aval de l'Exécutif".
De son côté, Khalid Hajji, secrétaire général du Ceom (le Conseil européen des oulémas marocains), tente aussi de faire émerger un contre-discours. Pour ce faire, il a rassemblé ce jeudi 8 mars à Bruxelles, pour la huitième année d'affilée, une bonne centaine d'imams. L'objectif était de les former aux valeurs communes. Il y a urgence, assène-t-il. "Je sens que l'influence du salafisme est en repli. D'ailleurs, ce courant n'est pas éternel dans la tête d'un jeune. Il tient jusqu'à ses 25 ans au maximum. Après, l'adulte se rend compte que réduire la religion à des normes mathématiques, au permis, pas permis, est un fardeau. Du coup, nous formons les imams pour qu'ils puissent aider ces jeunes à faire grandir en eux une spiritualité, et qu'ils découvrent comment inscrire leur foi dans le contexte européen.”
Le Centre Citoyen Belge Musulman Laïque, co-fondé par Hamid Benichou et Daoud Azam Daimoussi, commence aussi pour sa part son travail de modernisation de l'Islam.
Le Salma festival, une évènement bruxellois multiculrel, qui invite des personnalités de tous horizons dans le but de favoriser les rencontres et de déjouer la peur, est un autre exemple.
Il semblerait bien que ces initiatives démontrent l'émergence de contre-courants dans l'Islam qui ne sont pas à sous estimer.
(FvE - Source: La Dernière Heure / Illustration picture: Pixabay)