40-45: des Wallons coupables de crimes contre l'humanité?
C'est une information révélée par la RTBF ce mardi: pendant la deuxième guerre mondiale, des soldats wallons, collaborateurs de l'armée allemande se seraient rendus coupables d'un crime contre l’humanité. Ils auraient participé à l'élimination physique de plus de 6.000 femmes juives, prisonnières au camp de Stuthof, en Pologne. Un dossier conservé par la justice allemande semble bien démontrer leur implication.
Cette sombre page de notre histoire commence par une émission radio consacrée à l’ouvrage "Papy était-il un nazi ?", diffusée sur la Première. Un auditeur contacte la RTBF car le sujet ne le laisse pas indifférent. Son père a en effet combattu dès 1941 dans la légion wallonne, comme plusieurs milliers de Belges ayant choisi de se battre aux côtés des Allemands. Persuadés qu'il faut faire barrage au communisme, ils seront nombreux à répondre à l'appel de Léon Degrelle", le leader rexiste.
A la recherche de détails sur le passé de son père, Antoine (c'est le prénom de l'auditeur) connaît depuis l'âge de 14 ans, le passé de collaborateur de son géniteur. Mais son père lui a toujours affirmé qu'il ne savait rien du sort réservé aux juifs lorsqu’il se battait en Russie".
A la suite du suicide de son père, Antoine a l’intuition que celui-ci ne lui a peut-être pas tout dit. Il confie ses doutes à cette émission de la RTBF. Au bout d'une longue enquête sur ces collaborateurs wallons, un début de réponse viendra d'abord, début 2019, dans un ouvrage intitulé "Drang naar Oosten" (la marche vers l’est), rédigé par Frank Seberechts, un historien flamand. Il y décrit sans complaisance les atrocités commises par les collaborateurs flamands sur le front de l’est.
Cet historien donne à la RTBF un nom: Palmnicken,une petite ville des bords de la mer Baltique, en Russie aujourd'hui, mais en Allemagne, à l'époque.
Nous sommes en janvier 1945. Devant l'avancée constante des des troupes Russes, les Allemands comprennent qu’ils ont perdu la guerre. Il faut effacer rapidement les traces de leurs exactions, vider dans l'urgence les camps de concentration.
A Stuthof, en Pologne, 6000 femmes juives sont gardées par des soldats. Les chefs sont des Allemands, des SS. Les soldats, dont plusieurs dizaines de Flamands, viennent de différents pays : France, Russie, Belgique. Pour Frank Seberechts, "il y a aussi des francophones, venus de Wallonie mais aussi de Bruxelles. Il n’y a vraiment pas que des Flamands… "
Fin janvier, les gardiens du camp de concentration reçoivent l’ordre d’éliminer les 6000 prisonnières juives. Dans un froid glacial, commence une marche funèbre vers la ville de Königsberg, une centaine de kilomètres plus loin. Faibles et peu vêtues, les malheureuses meurent presque toutes en route. Les survivantes seront emmenées jusqu’à la plage de Palmnicken, où elles sont obligées d'entrer dans l'eau, partiellement recouverte de glace.
Selon Frank Seberechts, les soldats "les mitraillent, leur lancent des grenades. Certains ne tireront pas, mais d’autres, en revanche, décrivent le plaisir qu’ils ont éprouvé à exécuter ces femmes, dans leurs écrits d’après-guerre. Leur haine n’a pas de limite."
Un témoignage qui semble démontrer que des collaborateurs Wallons ont participé à un massacre de masse. A la suite de ces révélations, la RTBF, aidée par un journaliste local redécouvre un dossier de 1600 pages, rédigé par la justice allemande dans les années '60. Les enquêteurs de l’époque ont interrogé des survivantes du massacre en Israël, où elles se sont installées après la guerre. Et elles confirment la présence des tueurs wallons. Le travail d'enquête de la justice allemande, est précis et rigoureux. Et pourtant, personne ne sera jugé pour le crime de Palmnicken…
(LpR - Source : RTBF/ Illustration Picture : Pixabay )