Les chasseurs ont-ils importé la peste porcine?
Comment le virus de la peste porcine est-il entré en Belgique et a-t-il contaminé au moins 28 sangliers jusqu'ici? Il a été importé de L'Europe de l'Est par l'homme, c'est aujourd'hui un fait établi. Les premières analyses génétiques génétiques effectuées sur les carcasses retrouvées en Wallonie sont formelles : le génotype identifié a déjà été décrit du côté de la Moldavie, de l'Ukraine ou encore de la Biélorussie.
Deux hypothèses restent à vérifier. Celle, assez fantaisiste, du "sandwich polonais", soit l'abandon d'une nourriture infectée par un routier. Et celle, jamais démontrée, de l'importation de sangliers, pour embellir les tableaux de chasse de grands propriétaires. Une troisième option, peu entendue jusqu'ici, mérite toutefois d'être approfondie. Celle d'un chasseur qui aurait été faire du tourisme (pour la chasse) dans une zone infectée, ou dans une zone qui n'avait pas été encore identifiée comme contaminée.
Rappelons que le virus de la peste porcine résiste jusqu'à dix-huit mois dans du sérum et du sang à température ambiante, 140 jours dans du jambon séché et plusieurs années dans des carcasses congelées. Des objets comme des pneus ou des bottes peuvent le véhiculer.
Le Soir, qui publiait ce reportage sur son site internet il y a quelques jours, a rencontré André Magerotte, un éleveur de cochons et boucher-charcutier bio à Nassogne. Il est intarissable sur les causes de la peste porcine et accuse, lui, certains propriétaires de grandes chasses d'importer des sangliers depuis les pays de l'Est.
Alors que l'on s'interroge encore sur l'origine de cette épidémie, l'éleveur balaye quelques hypothèses d'un revers de la main. "On se moque vraiment du monde en nous faisant croire que les sangliers sont contaminés par la peste porcine africaine à cause d'un chauffeur routier qui aurait jeté les restes d'un sandwich au jambon acheté dans les pays de l'Est. Donc, le type aurait acheté son sandwich en Tchéquie ou en Roumanie et aurait attendu d'être en Belgique pour ouvrir sa fenêtre et se débarrasser de ce qu'il n'a pas mangé. Et là, un sanglier aurait avalé les miettes. Franchement..."
A proximité de sa boucherie, au milieu de ses porcs qui évoluent en plein air, M. Magerotte ne dissimule pas sa colère à l'encontre des autorités. "Qu'on arrête de nous avancer des excuses bidons. Au ministère wallon de l'Agriculture, à l'Afsca et à la Division Nature et Forêt, ils savent très bien qui a amené la peste porcine chez nous", explique-t-il.
Les coupables selon lui? "Ce sont des propriétaires de grosses chasses qui veulent faire plaisir aux chasseurs de peur qu'ils aillent ailleurs. Ils veulent rentabiliser leur bien. Ils se rendent en douce dans des fermes d'élevage dans les pays de l'Est et ils y achètent des sangliers bien gras. Ça permet aux chasseurs de se targuer d'avoir de gros trophées. Ils les amènent en Belgique en douce dans des camions bennes. A la frontière, il n'y a aucun contrôle. Tout le monde est complice. Avec le résultat qu'on connaît maintenant...", s'indigne-t-il.
Obligé de doubler les clôtures autour de son exploitation pour protéger son cheptel, M. Magerotte vit des heures difficiles: "Si un sanglier devait quand même entrer en contact avec mon élevage, je peux tout abattre", redoute-t-il. "(...) Tout ça à cause de la bêtise et de la cupidité de quelques propriétaires terriens," conclut-il, dépité.
(LpR avec Le Soir+ et Le VIf/Picture : Belga)