Chansons de Noël : par ici la monnaie mais gare à l’indigestion
Longtemps cantonnées à l’univers musical anglo-saxon, les chansons de Noël deviennent aujourd’hui incontournables dans le répertoire de presque tous les artistes. Petit survol très subjectif…
Souvent éclipsés par les hits de ce genre très particulier qui reviennent nous hanter chaque année, il s’avère extrêmement difficile de se faire une place sous le sapin avec une nouvelle rengaine aussi originale que possible. Plusieurs options se présentent donc aux apprentis Bing Crosby (le spécialiste historique du genre), Wham ! ("Last Christmas" en 1984) ou Mariah Carey (et son insupportable "All I Want For Christmas Is You" millésimé 1994).
La première consiste à « revisiter » les éternels classiques mais la recette s’avère quelque peu éculée. Qui, en effet, attend encore vraiment une nouvelle interprétation de "Jingle Bells", "White Christmas", "Santa Claus Is Coming ToTown" (Frank Sinatra), "Rockin'Around The Christmas Tree" (Brenda Lee) ou, pour les francophones, "Petit papa Noël" (Tino Rossi)/ Même si l’interprétation déchirante de "Silent Night' par Sinéad O’Connor (1990) en apporte un démenti cinglant…
La seconde alternative consiste à tout miser sur un humour teinté de second degré quitte à ne s’adresser qu’à un public de niche réfractaire aux marchés de Noël et autres réjouissances obligatoires de saison. Dans le genre, personne ne peut rivaliser avec Andy Partridge, l’ancien chanteur du groupe anglais XTC, qui s’est lancé à corps perdu dans un projet intitulé" My Failed Christmas Career" dont le premier volume est sorti en 2022. On le soupçonne cependant d'adorer la fête célébrant le solstice d'hiver !
Troisième option, rester soi-même et espérer ainsi tirer le gros lot hivernal. Parfois, le résultat escompté est au rendez-vous comme pour le groupe anglais Slade avec leur "Merry Xmas Everybody" en 1980. Deux ans plus tôt, même s’ils habitent une région qui ne voit jamais la poudreuse (en tout cas celle sur laquelle on skie !), les Eagles de Californie avaient ajouté à leur tableau de chasse un "Please Come Home For Christmas" pressé en 45t sur un vinyle blanc évidemment ! Cette chanson écrite en 1960 par le bluesman Charles Brown a depuis été honorée entre autres par Bon Jovi, Willie Nelson ou plus récemment Georges Ezra.
Dernière solution, si les clochettes et autres grelots tintinnabulants n’appartiennent absolument pas à votre ADN musical il n'est pas interdit de ruer dans les brancards. Certains groupes punk comme les bien nommés Bad Religion s’en font même une spécialité. De notre côté, nous avons exhumé pour vous un succulent "Merry Christmas (I Don’t Want To Fight Tonight)", OVNI de l'album "Brain Drain" des Ramones en 1989.
Sans être totalement immunisé, le rap semble moins enclin que les autres genres musicaux à sacrifier à cette tradition même s’il existe des versions hip hop (aussi aseptisées qu’inaudibles de "Jingle Bells"). Parmi les premiers à avoir franchi le pas, on peut notamment citer le groovy "Christmas Rappin" de Curtis Blow (1979), le plus abrupt "Christmas In Hollis" de Run DMC (1987) ou encore l’indigeste "Christmas In Harlem" de Kanye West (2010) qui ne rate évidemment jamais une occasion de se faire remarquer.
Et si vous aimez ces mélodies de circonstance, du rock au folk, du metal au rap, de la country à la pop, vous n’aurez donc que l’embarras du choix. Et si mon opinion personnelle vous intéresse (et je comprends très bien que ce ne soit nullement le cas), à quelques rares exceptions près, les chansons de Noël me donnent plutôt de l’urticaire. Quoi qu’il en soit, Joyeux Noël à tous ! En ce qui me concerne, e vais de ce pas écouter à nouveau "Back Door Santa", un blues poisseux de Clarence Carter, une des rares ritournelles qui trouve grâce à mes yeux...
(AK - Photo : © Etienne Tordoir)
Photo : Joey Ramone, chanteur des... Ramones, au Torhout Festival (Belgique) en juillet 1985